vendredi 6 septembre 2013

Le Fil du Destin - María Dueñas

J’ai découvert le roman de María Dueñas par pur hasard : après une période où j’ai dû lire beaucoup de livres plus « sérieux » et de la critique littéraire, je voulais tout simplement me reposer en lisant quelque chose de plus facile, plus rapide à comprendre. Je m’attendais, je dois bien l’avouer, à un roman sentimental et je me préparais à lire une intrigue très prévisible, comme c’est le cas le plus souvent pour ce genre de roman de « vacances ».
Le début du roman semblait répondre parfaitement à cette attente : dans les années ’30, Sira Quiroga, une jeune Espagnole d’origine modeste semble avoir un destin tracé d’avance : suivre sa mère dans le métier de couturière et épouser par amour un homme de la même condition. Sa vie va basculer au moment où elle rencontre Ramiro, un séducteur dont elle tombe éperdument amoureuse. En même temps, elle fait la connaissance de son vrai père, un riche aristocrate espagnol qui lui donne beaucoup d’argent et de bijoux. Sira suit Ramiro au Maroc, elle lui confie tout son argent et ses bijoux et se retrouve quelques mois après abandonnée à Tanger, sans un sous et avec une dette colossale pour la chambre d’hôtel. Oui, jusqu’ici, j’avais l’impression de me retrouver face à un feuilleton des  plus classiques.
Dévastée, Sira se réfugie à Tétouan, dans la partie du Maroc soumise à l’époque au protectorat espagnol, où elle sera obligée de reprendre son activité de couturière pour pouvoir survivre et payer sa dette. Elle réussit, après plusieurs péripéties, à ouvrir un atelier de couture qui deviendra fameux parmi les dames de l’aristocratie européenne, en général des Espagnoles et des Allemandes. C’est ainsi qu’elle fait la connaissance de Rosalinda Fox, une Anglaise entraînée dans une relation sentimentale avec Juan Luis Beigbeder, un haut responsable du protectorat. Les deux femmes se lient d’une amitié sincère malgré les différences de classe qui les séparent. L’Espagne est dévastée par la guerre civile et Sira décide de faire jouer ces relations, et celles de Rosalinda notamment pour faire sortir sa mère du pays et l’amener au Maroc. C’est ainsi qu’elle connaît Marcus Logan, un journaliste anglais, mais aussi des personnalités politiques de l’époque, tel que Serrano Suñer, le beau-frère de Franco, et autres responsables de l’Espagne franquiste et de l’Allemagne nazie.
A la veille de la seconde Guerre Mondiale, Rosalinda Fox lui fait une proposition à la limite de la raison : rentrer en Espagne et devenir espionne pour le compte des Anglais, sous la couverture d’un atelier de couture de luxe. Poussée par sa mère, Sira finit par accepter, et de là, l’histoire devient une fresque de la société espagnole de l’époque de Franco, scindée entre les intrigues politiques d’une aristocratie généralement pro-allemande et les réalités sociales et économiques des gens du peuple dans une Espagne encore ravagée par les horreurs de la guerre civile.

Une grande partie des personnages,  comme Rosalinda Fox, Juan Luis Beigbeder, Serrano Suñer, Franco la plupart des personnages allemands et anglais qui apparaissent dans le roman, sont bien réels ; ils ont existé et ont réellement vécu une partie des événements racontés. Le travail de documentation de l’auteur est d’ailleurs expliqué à la fin du livre. L’histoire d’amour entre Sira et Marcus Logan devient accessoire, la fin du roman le montrant très bien : l’écrivaine propose plusieurs variantes pour le destin de ses personnages fictionnels, laissant le choix au lecteur, se concentrant de restituer le destin des personnes réelles. Somme toute, ce roman m’a agréablement surprise par sa manière de raconter l’Histoire et de ne pas ennuyer son lecteur : à part quelques chapitres du début, je n’ai jamais pu prévoir ce qui va se passer avec les personnages.